«Fat Bob», le nom du modèle, est peu flatteur - à moins que sa perception soit plutôt martiale.
Pas de doute : elle a l’air plus méchant que ses autres sœurs de la série Softail. Le phare rectangulaire, plutôt atypique pour Harley-Davidson, lui va étonnamment bien. De toute manière, avec la nouvelle combinaison de couleurs rouge/noir et le sigle sur un seul côté du réservoir, la machine a particulièrement belle allure. La peinture séduisante se distingue nettement des modèles de l’année précédente, peints en blanc ou marron métal. Il est toujours étonnant de constater à quel point les couleurs exercent leur effet.
En attendant, la désignation du modèle est parfaite. Dotée d’un petit « bidon » plutôt que d’une silhouette élancée comme une Chopper classique, la Fat Bob justifie son nom. Outre le phare à l’allure mastoc, c’est avant tout la roue avant, relativement énorme, qui confirme cette impression, tout comme l’absence de chrome aux silencieux et sur le capot du moteur. Ici, le noir est de mise. Malgré tout, le poids lourd avec ses 306 kg pèse un peu moins que les sœurs de série Low Rider S ou Sport Guide, par exemple, qui paraissent visuellement plus légères. Un autre élément associé à l’apparence générale est le porte-plaque séparé, fixé à la fourche (emplacement généralement peu apprécié des motards).
Pour une Harley-Davidson, la position du siège est passablement orientée vers une conduite active - et c’est très bien ainsi. La Fat Bob dotée de pneus Dunlop est facile à mettre en courbe, mais au vu des dimensions 150/80, la roue avant au format 16 pouces n’apprécie guère les inclinaisons. Celles-ci doivent être sollicitées avec insistance. Il faut donc des annonces claires, car on ne peut pas compter sur la légèreté d’une Street Bob ou Sport Glide. De même, le maintien du rayon de braquage lors de l’accélération à la sortie d’un virage demande parfois une légère impulsion corrective de la direction, en raison de la tendance de la moto à se redresser. Ce n’est pas une critique, mais bien l’un des atouts de charme de la Fat Bob et du plaisir de conduire qui lui est propre : cette machine demande à être dirigée plus fermement que d’autres. Parfois, le pilote assis derrière le guidon relativement haut aura l’impression d’attraper un taureau par les cornes… En courbe, pourtant, la Fat Bob montre une facilité surprenante qui bluffe les pilotes.
Ne nous attardons pas sur le moteur 114 (appelé selon son volume en inch cubique) puissant. La propulsion amplement connue avec 1,87 de cylindrée et son couple de 160 Nm comble toutes les attentes. Les 94 CV (69 kW) ne sont pourtant plus considérés comme un atout permettant de se profiler - d’autant plus que le poids de la machine dépasse les 300 kg. Mais cela suffit toujours pour avoir une poussée suffisamment rapide et ne diminue nullement la fascination que l’on éprouve pour la puissante V2 au comportement sportif, même à bas régime, et au grognement sourd. De plus, nous avons fréquemment consommé moins de carburant que le volume annoncé comme la norme. En vue du moteur souverain, par contre, Harley-Davidson aurait pu nous faire grâce de l’indicateur de marche et du grand compte-tours rond. Nous aurions préféré un compteur classique, d’autant que les tours peuvent être lus de manière encore plus précise sur le petit écran numérique de l’ordinateur de bord intégré.
Emmener quelqu’un sur la Fat Bob est chose quasi impossible. Le petit siège passager est tout simplement trop petit et trop étroit pour la plupart des gens. Tout au plus, lorsqu’on doit pousser la moto à l’arrêt, la sangle pourra servir de poignée, car la main droite ne trouve aucun appui sur le cadre. Le maniement ne s’en ressent pas vraiment facilité. Grâce à la molette facile d’accès, le réglage de la suspension arrière, par contre, est plus aisé. La fourche avant n’est pas réglable. Un net besoin d’amélioration est constaté pour les rétroviseurs trop petits et trop courts ainsi que pour la béquille latérale, légèrement trop raide.
Avec la Fat Bob, Harley-Davidson essaie d’attirer un public plus jeune, car la Chopper paraît être trop associée aux personnes d’un âge plutôt avancé. Le succès sera-t-il au rendez-vous ? Pas sûr, car pour cette Harley aussi, il faut investir CHF 21’750.- au moins. Mais pour le rédacteur de ce texte - lui-même dans la catégorie des tempes grises - le bilan est clair : si une Softail, alors celle-ci!
Texte: Jens Riedel / mru